Autre version de la légende

 

Cette version est très différente, la structure du conte en est donc modifiée. J'ai demandé aux élèves de la lire, puis de dégager la structure de ce texte, avec l'aide de celle que l'on avait réalisée ensemble.

Ce qui nous a permis de comparer les deux légendes...

 

Voici le texte :

 

Mélusine

Dans « les plus beaux mythes de tous les temps »
Texte de Vàclav Cibula
Adaptation française de Catherine Hyndrak

 

 

         Il était une fois un jeune noble, seigneur de Lusignan, qui vivait dans le pays rhénan. Il n’était pas très riche et habitait un modeste château. Il vivait en bonne harmonie avec ses voisins, respecté par tous pour sa droiture et son honnêteté. Il avait une grande passion : la chasse. De temps en temps, il allait chasser en montagne ou bien  dans les forêts et ramenait des chevreuils, des sangliers et parfois des rapaces.

            Un jour, il chassait dans une petite vallée. Entre les versants de la montagne scintillaient les eaux bleu-vert d’un petit lac dissimulé par des joncs et le feuillage des arbres. Il s’arrêta pour contempler ce paysage calme et isolé. Soudain il aperçut au bord du lac une jeune fille ; elle était assise dans l’herbe et brossait ses longs cheveux au-dessus de l’eau. Sa chevelure brillait au soleil et était noire comme l’ébène. Elle était si belle que Lusignan resta interdit. Il la contempla longtemps, sans un geste, craignant de la déranger. Il finit pourtant par se décider à l’aborder et sortit de sa cachette. Mais à peine avait-il fait quelques pas que la jeune fille se retourna, l’aperçut et s’enfuit dans les fourrés. Le chasseur voulut la retrouver mais sans succès, elle avait disparu.

            Triste et malheureux, il s’en revint à son château et ne put dormir. L’image de la belle jeune fille assise au bord du lac le hantait. Il décida alors de la retrouver. Le lendemain, au petit jour, il partit pour la montagne par le plus court chemin. Il s’arrêta dans un taillis près du lac : la jeune fille était assise non loin de là. Il se faufila silencieusement entre les buissons à pas feutrés pour ne pas l’effrayer par le bruissement de l’herbe. Elle n’était plus qu’à quelques pas de lui ; il rassembla tout son courage et s’approcha. La jeune fille se releva rapidement, prête à fuir, mais le jeune noble avait saisi sa main et l’empêchait de partir. Elle avait peur et tremblait de tout son corps. Le jeune Lusignan lui sourit et lui dit d’une voix calme et douce : « N’aie pas peur ! Je ne te veux aucun mal. Dis-moi ton nom et ce que tu fais dans un endroit aussi isolé. Mais quelle importance ton nom et le reste ! Tu es si belle, je voudrais que tu partages ma vie. Viens avec moi et épouse-moi. Je ne pourrais plus jamais être heureux sans toi ! »

« On m’appelle Mélusine », répondit la jeune fille, « et je suis très heureuse de te plaire. Mais je t’en supplie, sois patient, donne-moi le temps de réfléchir à ta proposition. Reviens dans trois jours et je te dirai ce que j’ai décidé. »

Lusignan lui lâcha la main, elle plongea dans le lac et l’eau se referma sur elle. Il ne resta bientôt que quelques ronds de plus en plus larges à la surface de l’eau. Au troisième jour, le jeune seigneur revint près du lac, A peine s’était-il montré entre les arbres que la jeune fille aux longs cheveux d’ébène sortit des buissons. Elle accourut vers lui et lui dit, rayonnante : « Seigneur, j’accepte ta proposition. Je te suivrai et deviendrai ton épouse mais à une seule condition : tu ne dois jamais me voir le samedi. Ce jour-là, je reprends ma véritable apparence. N’oublie jamais ; si tu venais à trahir ta promesse, nous ne nous reverrions jamais. » Lusignan lui jura de tenir cette promesse et conduisit la jeune fille dans son château. Ils se marièrent quelque temps plus tard.

            Les jeunes époux vivaient très heureux et eurent plusieurs enfants. Lusignan respectait sa promesse. Jamais il ne questionnait Mélusine sur son secret. Chaque samedi, Mélusine s’enfermait à double tour dans sa chambre. Elle tirait les rideaux et demeurait enfermée et seule jusqu’à minuit. Elle se cachait aux yeux du monde, car ce jour-là elle se transformait en une fort étrange créature, moitié femme, moitié serpent. Le temps passait. Lusignan était de plus en plus tourmenté par cette étrange promesse. Il résista longtemps à la tentation, mais un beau jour sa curiosité fut la plus forte.

            Un samedi, alors que sa jeune épouse s’était enfermée dans sa chambre, il s’approcha de la porte sur la pointe des pieds et se pencha pour regarder par le trou de la serrure. Mais quelle ne fut pas sa surprise ! Sa femme semblait être la même, elle était toujours aussi belle. Mais ses jambes avaient fait place à un corps de serpent ! Elle était assise sur une chaise au milieu de la pièce, le regard perdu dans le vide. Soudain elle tourna la tête comme si elle avait deviné qu’on l’observait. Sur son visage était gravée une expression de souffrance et de tristesse. Elle éclata en sanglots et son image s’évanouit lentement dans la pièce pour disparaître complètement. Lusignan poussa un cri et enfonça la porte. La pièce était vide. Il demanda pardon à sa femme mais seul le silence lui répondit. Il fouilla alors toutes les pièces du château mais c’était peine perdue.

            Il alla chercher de l’aide chez les seigneurs du voisinage et organisa une battue dans la contrée. Ils fouillèrent chaque fourrée, chaque grotte, chaque caverne dans les rochers, chaque trou d’eau mais ne retrouvèrent pas la belle châtelaine.

            Et pourtant Mélusine se montre parfois. Elle apparaît près du lit de ses enfants ; son image est diffuse comme un nuage de brume. Elle leur brosse les cheveux, les câline, les serre contre sa poitrine. Son visage est empreint de tristesse. Lorsque son malheureux époux lui adresse la parole, elle le regarde longuement, tristement, et son image s’évanouit. Et il s’écoule beaucoup de temps avant qu’elle n’apparaisse de nouveau.         

            Tout le monde connaît la triste histoire de la jeune femme du lac. Et lorsque pendant les nuits d’hiver le vent vient battre les fenêtres ou se lamente dans la cheminée, on dit :
« C’est Mélusine qui cherche ses enfants… »

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Situation initiale :  (une première différence) Le seigneur de Lusignan vit seul dans le pays rhénan (pas de comte, le lieu diffère)

Evénement qui déclenche l'action : Le départ à la chasse. (pas de mort de comte...)

Rencontre : Il rencontre Mélusine, tout à fait par hasard, au bord d'un lac. Elle ne vient pas à lui. C'est lui qui veut la retenir mais ne le peut pas à la première rencontre.

Les actions : Ils se marient, mais il ne doit pas la voir le samedi. Par contre, pas question de construction d'édifices. Ils ont des enfants (on ne sait pas combien)

Ennemi : Sa propre curiosité. Pas d'intervention d'un autre personnage.

La suite du conte est identique dans l'esprit (pas dans les détails).

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Les élèves ont préféré la version de Cordeboeuf (celle qui s'inspirait de la légende écrite au Moyen-âge), ils l'ont trouvé plus intéressante, plus détaillée et ils aimaient l'idée que Mélusine avait laissé des traces de son existence en construisant des tas de monuments...

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